On a envie de te raconter l’histoire d’un métier très important il n’y a plusieurs années mais complètement oublié et obsolète aujourd’hui : les falotiers dits allumeurs de réverbères.
Retour dans l'histoire du 17e au 20e siècle d'un métier complexe qui a permis d'éclairer les rues de France.
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Il était une fois ...
Les « allumeurs » apparaissent avec l’éclairage public et les premiers réverbères fixent aux alentours de 1667.
Cependant, la lumière dans les villes n’est pas apparue du jour au lendemain et contrairement aux idées reçues, les villes étaient déjà bien illuminées avant l’apparition de l’éclairage public.
Dans le but de rendre les villes plus sûres, dès l’Antiquité, la luminosité des rues avait déjà son importance. Romains, Grecs et Égyptiens, avaient déjà mis en place de grandes lampes à huile et des chandelles dans des candélabres à l’extérieur des maisons et sur les étals des marchands. Quant aux jardins, ils étaient éclairés de torches accrochées aux arbres.
Avec le temps, l’illumination des villes se fait de plus en plus rare jusqu'à pratiquement disparaître aux Moyen Age. Seules quelques portes et tours sont éclairées, laissant aux citoyens nocturnes le soin de se guider avec leurs propres lanternes ou flambeaux.
Durant cette période d’obscurité, le nombre d’agressions et de dérives ne cesseront d’augmenter jusqu’au 16e siècle, où l’on pouvait compter environ 15 personnes succombant sous le coup des gangs de nuit malgré des édits régulièrement promulgués, afin que les citoyens accrochent des lanternes aux fenêtres de leurs maisons.
A cette époque, les policiers n’osent plus s’aventurer dans les quartiers dangereux et c’est seulement aux 17e siècle que la situation s’améliorera via l’installation de lanternes placées dans les rues de Paris et progressivement dans le reste de la France.
La réapparition de la lumière dans les rues des villes du pays voit l’apparition de deux nouveaux métiers :
- Les portes flambeaux, ils étaient payés aux quarts d’heure, le temps était décompté avec un sablier qu’il portait constamment sur eux et accompagnaient les passants.
- Les veilleurs de nuit eux accompagnaient les noctambules avec une lanterne numérotée par la police. Ils aidaient les gens à traverser les endroits difficiles de la ville.
Et la lumière fut !
La véritable évolution viendra en 1667 avec le lieutenant de police de Paris Gabriel Nicolas de la Reynie et la promulgation de la taxe « Taxe Boue et lanternes » imposées aux propriétaires pour l’aider à réaliser son objectif.
Sa mission ? Sécuriser et assainir les rues. Il transformera la ville en pavant les rues, réalisant l’adduction d’eau potable et bien évidemment l’éclairage publique en installant 6500 lanternes à chandelles partout dans la capitale !
Il faudra attendre encore quelques décennies avant de voir l’apparition des premiers falotiers.
Début 18e, les lanternes prennent de la hauteur et sont maintenues en l’air via un système de poulie. A l’origine ce sont les citoyens désignés par les autorités qui devaient allumer les lanternes publiques à des horaires fixes. Cependant, nombre d’entre eux ne faisaient pas la tâche correctement et ainsi sont nés les « allumeurs de réverbères »
La tâche ingrate d’un métier légendaire
1766, rue Dauphine, révolution !
Les premiers réverbères à huile de colza sont installés et remplaceront bien vite les lanternes à chandelles. Munis d’un bec à huile et d’un jeu de réflecteurs pour amplifier la lumière, c’est cette réverbération qui sera à l’origine du nom du dispositif.
Quand l’hiver arrive, on ajoute de l’huile de colza et de l’huile de cameline ou du chanvre pour résister au froid et au gel.
A la genèse, les réverbères ne sont pas sur pied mais suspendus et espacés de 60 m les uns des autres.
Les conditions de travail de l’allumeur sont très difficiles et le salaire était extrêmement faible au point d'être insuffisant pour faire vivre une famille.
Horaires ingrats, travaillant par tout temps, les allumeurs de réverbères n’ont aucun jours de repos.
Ils doivent allumer et éteindre les réverbères mais également les nettoyer et les entretenir.
Dans les débuts du métier, les falotiers travaillaient par deux, l’un maintenant la corde de la lanterne quand l’autre allumait, l'éteignait et la nettoyait. Puis quand le réverbère devint fixe, l’allumeur travailla alors seul, équipé d’une longue perche pour allumer et éteindre la lampe.
C’est entre 1817 et 1820 que les premiers réverbères au gaz font leur apparition.
Néanmoins face à un gouvernement réticent, ce n’est qu’en 1830 qu’ils se démocratiseront avec 9000 réverbères installés à Paris et jusque 23 000 au milieu du 19e siècle.
Et à la fin ...
Les allumeurs de réverbères existent encore mais changent de noms, on les nomme maintenant les allumeurs de gaz.
L’exposition universelle de 1878 marquera le début de la fin du métier avec la mise en place des premiers lampadaires électriques. Les premières lampes à arcs électriques utilisent le courant alternatif et s’intitulent « bougies Jablochkoff » et sont vite perfectionnées par Thomas Edison en 1879.
C’est dans les années 1880 que le métier d’allumeur de gaz disparaîtra définitivement.
Aujourd’hui, il ne reste qu’un seul réverbère au gaz dans l’air urbain, il est situé à Malakoff en banlieue parisienne. Nommé « Léon » par ses habitants qui défendent âprement ce morceau d’histoire pour le garder en vie, ils ont créé une association pour entretenir le dispositif qui brûle jour et nuit afin de diminuer l’usure que provoque l’allumage et l’extinction de l’appareil.
Ces métiers qui disparaissent - La croix
On espère qu’il restera deux appareils en vie, Léon et celui du petit prince.
Tu veux découvrir un autre métier ? Viens lire notre article sur le métier de juicer (et peut-être arrondir tes fins de mois) :